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Construire aujourd’hui à partir de matériaux biosourcés
Les qualités intrinsèques du bambou – un matériau millénaire, capable de stocker le carbone –, sont aujourd’hui utilisées avec de nouvelles méthodes de traitement pour offrir aux habitations une durée de vie plus longue. Ainsi, on annonce au bambou un futur rayonnant en dehors des frontières de l’Asie.
La terre crue, désormais associée à la fameuse impression 3D, permet quant à elle de réaliser rapidement des habitations à la demande, revisitant l’architecture vernaculaire dans une politique d’écologement.
Quand le beau rencontre la technologie, l’être humain peut développer des trésors d’imagination pour tenter de sauver sa planète et transformer l’univers de la construction, l’une des activités les plus polluantes de notre société, en un pôle de création plus responsable et vertueux.
Des architectes aux profils variés et dont la renommée grimpe, comme l’Italien Stefano Boeri, fervent défenseur de la cause écologique en architecture et auteur de la Fôret verticale de Milan, ainsi que le Belge et Parisien d’adoption Vincent Callebaut, co-concepteur du Pavillon belge à l’Exposition universelle 2020, qui pense des projets internationaux et à dimension biomimétique, s’imposent comme les noms à retenir parmi les bâtisseurs de l’architecture green, toujours plus nombreux.
L’Arc monumental en bambou du collectif d’architecture IBUKU
The Arc at Green School (2021) est l’un des derniers projets de l’agence d’architecture indonésienne IBUKU, formée par plusieurs jeunes architectes et designers et forte de l’expérience d’une centaine de constructions en bambou. Elle prend place à la Green School : un lycée privé et international de renommée mondiale, situé le long de l’Ayung ; la plus grande rivière de l’île de Bali en Indonésie.
Une agence d’architecture participative à la pointe de l’éco-technologie
Les réalisations de la firme IBUKU exploitent habituellement la courbe naturelle des cannes. Pour ce projet, leur principe est resté simple : afin de dessiner cette arche imposante et former ses poteaux, les pointes des cannes ont été rassemblées en les liant.
Cette extension a été ainsi fabriquée avec un bambou local et géant répondant au nom Dendrocalamus asper. Également connu sous le nom de Petung, celui-ci provient des îles de Bali ou encore Java et Florès. De croissance rapide, le bambou peut être utilisé en colonnes structurelles dès les trois premières années de pousse, alors qu’il faut attendre dix à 20 ans pour un bois résineux.
Un bâtiment naturel et durable par définition
The Arc offre une surface utilisable de 760 mètres carrés et des dimensions extérieures de 23,5 mètres de large, 41 mètres de long et 14 mètres de haut. Avant la construction, le bambou a été traité avec une solution saline naturelle. Ce matériau a été également testé en laboratoire pour confirmer sa durabilité et le rendre non comestible pour les insectes. Il devient alors aussi résistant que le bois, bien qu’il ne puisse pas y être directement comparé.
Solide et doté de la force de compression du béton, le bambou est un matériau unique en son genre et une référence dans les constructions ultra-légères. En exploitant ses qualités à l’extrême, il permet de créer de grands volumes avec une structure minimale. Ici, les voûtes sont maintenues en place par des trames tendues, qui se drapent dans l’espace. Les trames, offrant un espace plus intime, dessinent un jeu d’amples tressages et de plus fines arches. Structurelles, bien qu’attachées aux arches, elles aident ainsi à redistribuer le poids le long de celles-ci. Une prouesse technique.
Tirer parti du meilleur du bambou en construction
« Les bâtiments en bambou sont comme un organisme vivant. Chaque poteau en bambou représente l’ADN du bâtiment. Chacun étant unique, comme de véritables brins d’ADN formant une structure en réseau. Chaque poteau possède sa propre fonction spécifique que ce soit pour les murs, les plafonds, les escaliers ou le toit. En se réunissant, ils forment un corps… », raconte la Canadienne Elora Hardy, fondatrice de l’agence d’architecture et de design IBUKU et directrice de la création au sein de celle-ci depuis 2010.
Fille du couple canado-américain John et Cynthia Hardy, fondateurs de la Green School – un projet pionnier d’école durable inauguré dans les années 1990 –, Elora Hardy a poursuivi l’œuvre de ses parents. L’entrepreneuse a aussi créé la société de construction spécialisée PT Bamboo Pure. Pour ce faire, elle a été épaulée par l’expertise d’un maître de la construction en bambou, l’Allemand Jörg Stamm, qui a développé le concept de la « tour centrale » en forme de panier en bambou tressé. Une création qui permet de soutenir de grandes bâtisses.
Tandis que certaines constructions en bambou peuvent atteindre l’âge de 100 ans, The Arc a été construit pour durer au moins 25 ans. Grand hall polyvalent ou gymnase pour les activités sportives, ses usages sont multiples.
Une maison high-tech en terre imprimée en 3D par WASP et Mario Cucinella Architects
Sise en Italie, Tecla (2021) est la première maison expérimentale fabriquée à partir de la technique de l’impression 3D et entièrement composée de terre crue. Ce prototype, dont l’étude a été initiée en 2019, est une signature de l’agence Mario Cucinella Architects et de la société italienne WASP, spécialiste de l’impression 3D.
La maison Tecla a été construite à Massa Lombarda près de la ville de Ravenne en Émilie-Romagne. Elle allie la matérialité et l’esprit des habitations anciennes et intemporelles avec les exigences du monde actuel de l’architecture.
Une maison pilote zéro déchet, avec une coque entièrement biodégradable ; cette structure répond aux besoins essentiels et peut devenir une solution d’urgence, notamment pour les réfugiés climatiques.
Un bâtiment futuriste et écologique à la qualité de fabrication italienne
Digne héritière de la Maison des Jours Meilleurs réalisée à la demande de l’Abbé Pierre en 1956 par le Français Jean Prouvé, architecte « engagé » avant l’heure, et façonnant l’avenir de la construction, la Tecla offre une forme étudiée s’accordant avec toutes les conditions climatiques. Elle nécessite deux bras d’impression 3D synchronisés, avec l’aide d’un logiciel capable d’optimiser les mouvements, d’éviter les collisions et d’assurer un fonctionnement simplifié.
Pour cette infrastructure de 50 mètres carrés, il a fallu compter 200 heures de travail ; 60 mètres cubes de terre et 350 strates de 12 millimètres d’épaisseur. La fabrication 100 % made in Italy a été confiée à des entreprises locales.
De l’utopie à la réalité, les avantages d’une écoconstruction
Affichant un lien fort entre le passé et le présent, le concept reprend celui des maisons imaginées par l’écrivain italien Italo Calvino dans son roman « Les villes invisibles » publié en 1972.
Conçu comme une cellule de base modulable et extensible, ce nid de 60 mètres carrés offre des formes rondes, organiques et sinueuses. Sous le double dôme de ce chaleureux igloo d’argile, un espace communiquant, éclairé par la lumière zénithale d’ouvertures circulaires.
La zone de jour et la zone de nuit sont séparées mais non cloisonnées pour former une pièce à vivre, une chambre et une salle de bains. Selon les principes de l’écoconstruction, les murs en terre crue locale, à faibles émissions de carbone, sont naturellement ventilés et isolés. Le mobilier, en partie imprimé en 3D, est intégré dans la structure du bâtiment. Il peut ainsi être recyclé ou réutilisé.
A l’extérieur, les eaux de pluie et les déchets sont réemployés pour le jardin tandis qu’une autre cellule dotée de panneaux solaires et thermiques fournit l’énergie propre de la maison Tecla. Un modèle pour l’architecture green de demain.