Récompensée, en 2023, par le Grand Prix d’Architecture de Wallonie, cette réalisation témoigne de l’intégration parfaite d’une rénovation dans un écrin de verdure. « Je n’ai rien fait, le terrain a dicté ma réflexion », déclare l’architecte Bruno Erpicum, qui poursuit l’idéal de faire disparaître une construction, en l’insérant dans une faille du terrain. En témoignent ses réalisations en Grèce ou dans les dunes belges ». Ici, dans le pavillon « aux murs vitrés opposant les lignes droites aux courbes de la nature », les colonnes s’apparentent aux verticales des troncs d’arbres, les cadres fixes des châssis ont été intégrés. Le nombre des coulissants a été réduit. Les vitrages s’assemblent en angle. Mariage du verre, du bois, de la pierre, le lieu déploie « la politesse de la matière invisible ». Luminaires Balloons chez Brokis.
La maison actuelle se glisse dans les traces de l’habitation existante, conçue à la fin des années 1950 par un couple d’architecte et botaniste. Elle se compose désormais de deux niveaux. Sous la dalle de toiture, les espaces s’ouvrent à 360° sur le paysage. Le niveau supérieur propose un mode de vie extraverti, une perspective horizontale et dominante, en relation directe avec le paysage. « La structure centrale s’ouvre comme un parapluie et concentre les espaces de services ». Avec un nombre restreint de matériaux, le grand salon et la cuisine, dessinée sur mesure par Bruno Erpicum, se déploient en cultivant le less is more. Dans un placard, un bureau console, avec tiroirs et prises pour connections, conçu par l’architecte, joue à cache–cache avec l’espace minimaliste. Canapé Extrasoft chez Living Divani. Luminaire Oda chez Pulpo.
Autour d’un volume à toit plat, les anciens propriétaires avaient créé un jardin, miroir de la diversité des végétaux, avec une grande rocaille et de nombreuses plantes d’altitude. Dans la partie haute de la propriété où prédomine une futaie de chêne et de pin, ils avaient installé un circuit d’eau desservant un grand étang. Pour imaginer la nouvelle maison, l’architecte s’est librement inspiré de la Wayfaers Chapel, situé à Rancho Palos Verdes, en Californie. On pense aussi à la première maison californienne de Frank Lloyd Wright… « là où l’architecture s’efface et laisse la vedette à la nature ». Dans la salle à manger, comme partout, des vitrages très isolants et un débordement périphérique de la toiture composent l’ombrage indispensable. « Nous avons beaucoup travaillé la réflexion des vitrages, pour qu’elle soit très limitée, à l’intérieur, et que le verre soit le plus transparent possible ». A l’extérieur, le bassin triangulaire de la piscine, fait référence à la forme de la maison d’origine. Table sur mesure, dessinée par Bruno Erpicum. Chaises, modèle CH20 Elbow, création Hans J. Wegner en 1956, réédité chez Carl Hansen.
Au niveau inférieur, la perception de l’environnement extérieur est très différente. On y accède, par une descente scénarisée et une promenade dans un hall de nuit, ponctué de deux œuvres d’art, créant une véritable transition. Aménagées au frais, les trois chambres – l’une composant une pièce de grandes dimensions – accompagnées de leur salle de bain respective, sont aussi dotées d’ouvertures généreuses. Coiffées par le sous-bois, elles offrent deux vues descendantes vers les ravins. On se sent, à la fois, seuls au monde et protégés. La dualité minérale et végétale s’exprime aussi dans l’atmosphère des pièces d’eau, aux sols et murs nappés de dalles en pierre de schiste belge. La robinetterie (modèle Opus), dessinée par l’architecte, est signée CEA. La baignoire en îlot, à pose libre, en Solid Surface, blanc mat (modèle Bilbao chez Riho), avec son bel ovale, compose l’élément principal de l’espace épuré, où le mobilier est réduit à l’essentiel.
Côté jardin, les traces de son dessin originel ont été conservées. Seuls deux arbres malades ont été abattus. Des massifs de plantes de terre de bruyère composent un tapis fleuri au pied des arbres. Des collections d’arbustes décoratifs sont déclinées à travers une vingtaine de parcelles thématiques. Le haut du plan d’eau est notamment agrémenté par deux érables du Japon, une importante collection de rhododendrons et d’azalées. Tandis qu’en contrebas, une roseraie, avec des platebandes séparant les surfaces gazonnées, s’associent à des pivoines. Une lande occupe la partie supérieure de la colline. Les étangs existants ont été remis en état et remodelés. Le salon et la salle à manger sont encadrés par une terrasse végétalisée, habillée de pierre. En périphérie, la toiture est également tapissée de plantes, avec des panneaux solaires, en son centre. Table et bancs Hopper, banquettes Sol et Luma, chez Extremis (erpicum.org).